Laurent Anselmi, Délégué aux Affaires juridiques auprès du Gouvernement : « Nous sommes le Conseil Juridique du pouvoir exécutif. »

2016 09 anselmi

Diplômé de Droit Public fondamental à la Faculté de Nice, Laurent Anselmi, actuellement Délégué aux Affaires Juridiques auprès du Gouvernement, a un long parcours lié au droit : Conseiller d’Etat, Secrétaire Général de la Chancellerie des Ordres Princiers au Palais et, dans un registre plus ludique,  Vice-président du tribunal international du sport automobile à Paris et Président de la Commission de la langue monégasque. Ce passionné nous explique sa mission.

Quel est le rôle de la  Direction des Affaires Juridiques de Monaco ?  

La Direction des Affaires Juridiques est un service exécutif selon la Constitution. C’est-à-dire qu’il dépend de l’autorité directe du Chef de Gouvernement, chez nous, le Ministre d’Etat. Il faut comprendre que l’apport de notre direction est exclusivement technique et juridique. Les orientations politiques nous sont transmises par le Ministre d’Etat conformément aux directives qu’il reçoit du Prince Souverain. Nous sommes donc le conseil juridique du pouvoir exécutif. »

Comment la Direction des Affaires Juridiques est-elle structurée ?

Actuellement, cette Direction est composée de trois services différents : les Affaires Législatives, les Affaires Contentieuses et le Service du Droit International. Chaque service est sous la responsabilité d’un chef de service.

Le Service des Affaires législatives est en charge de la conception des textes législatifs et réglementaires. Il détient un savoir-faire en la matière. Il veille à la conformité des projets de loi à la Constitution, et au respect de la hiérarchie des normes qui, à partir de cette même Constitution, inclut le droit international, conventionnel et européen. Il s’attache également à la qualité de ces textes. De même, pour les ordonnances souveraines ou les arrêtés ministériels. Cette entité s’occupe aussi de tout ce qui est amendement des textes ou analyse des propositions de lois qui viennent du Conseil national. Nous sommes en effet au cœur de la négociation entre le Gouvernement et l’Assemblée.

Le Service des Affaires contentieuses assure la défense et les intérêts de l’Etat dans toutes les instances qui l’opposent à des personnes privées, physiques ou morales, devant toutes juridictions à Monaco et à l’étranger. Ce service fait beaucoup de consultation juridique pour le Ministre d’Etat et les Conseillers de Gouvernement. Il analyse aussi des recours émanant de particuliers et dans ce cadre là, peut travailler en liaison avec le Haut Commissaire à la protection des droits.

Enfin, le Service du Droit International est de création beaucoup plus récente. Il analyse la portée de tout traité ou convention que la Principauté envisage de ratifier ou de signer et émet sur ces sujets des avis techniques à l’intention du Gouvernement. Sa deuxième mission est d’assurer la défense de l’Etat de Monaco devant la Cour Européenne des droits de l’Homme à Strasbourg. A ce jour, la Principauté n’a jamais subi de condamnation réellement significative.

Quels sont les effectifs de  la Direction aux Affaires Juridiques ?

La Direction compte plus d’une vingtaine de personnes parmi lesquelles tous les cadres sont des juristes spécialisés dans différents secteurs. Droit constitutionnel, administratif, commercial, pénal, communautaire, ou encore celui lié aux nouvelles technologies. Beaucoup sont des docteurs en droit et plusieurs ont été avocats aux barreaux de Paris ou de Nice. »

Quels sont les projets sur lesquels vous travaillez  actuellement ?

Nous nous sommes beaucoup impliqués sur les lois qui viennent dans le sillon de conventions internationales. Trois d’entre elles ont, par exemple, été signées entre 2014 et 2016 au sujet de la transparence en matière fiscale. Un de nos autres chevaux de bataille a trait aux incidences juridiques des nouvelles technologies. Dernièrement, nous avons été associés à la création de l’Agence de Monaco de Sécurité Informatique ainsi qu’à la conception du projet de loi sur la criminalité technologique. C’est aujourd’hui un sujet incontournable tant au regard de la cyber-attaque qu’au regard du terrorisme. »

Le Droit monégasque n’est pas le Droit français. Quelles sont vos stratégies pour mieux le faire connaître ?

Notre service est « à la manœuvre » dans ce que l’on pourrait appeler les relations publiques du Droit Monégasque.
Dans cette mission, nous sommes soutenus par la maison d’édition avec laquelle nous travaillons pour la publication du « Code Monégasque ». Je co-rédige ce code avec le Professeur de Droit des Affaires Jean-Pierre Gastaud. Cet ouvrage rassemble l’essentiel des grands textes monégasques et s’attache à expliciter ce qui distingue notre droit du système français, en donnant des clés de lecture.
J’incite également mes collaborateurs à publier des articles dans des revues selon leur spécialité. Je les encourage à être membres d’associations de juristes en fonction, toujours, de leur spécialité. Par ailleurs, je ne refuse jamais de m’exprimer dans les universités ou devant des assemblées de professionnels car il me semble essentiel de se faire connaitre.

La Direction aux Affaires Juridiques pilote également le comité supérieur d’études juridiques, un organe crée par le Prince Rainier pour avoir, sur certains sujets juridiques complexes, un regard extérieur et collégial. L’essentiel des membres de ce comité sont des professeurs de droit enseignant au sein d’universités françaises ou des praticiens de haut niveau. Par conséquent, ces personnes portent aussi la parole du droit monégasque, ce qui est un autre moyen pour nous de nous faire connaître.